État de la technique discographique en 1951

• À partir du mois de Janvier 1951, la technique d’enregistrement sur disques 78 tours fait l’objet d’une révolution majeure tant chez Columbia que chez Pathé. Désormais, l’enregistrement électrique qui demeure en prise directe est enregistré sur une bande magnétique, constituée d’un ruban souple en matière organique revêtu d’oxydes métalliques polymérisés sur une des deux faces. Les fils de fer sont désormais abandonnés.
• Ainsi, la bande magnétique permet-elle une souplesse accrue lors des séances d’enregistrements, une grande facilité de relecture, un souffle d’enregistrement à peine perceptible, et un rendu des fréquences optimal, étendu, et de haute-fidélité (avec des équipements professionnels).
• Une fois un enregistrement validé, l’on va pouvoir le transformer en disque 78 tours. Mais, désormais (ce fut déjà le cas expérimentalement dès la fin 1950 pour quelques enregistrements réalisés sur fil de fer), l’on ne grave plus un flanc de cire, mais l’on grave dorénavant un disque Néocire, que l’on connaît en France sous la marque Pyral, encore dénommé dans le milieu du disque : un disque souple. Il s’agit d’un disque métallique en aluminium recouvert d’une couche de vernis cellulosique teint en noir. Et c’est à partir de tels disques Néocire que dorénavant l’on tirera les 78 tours enregistrés à partir de 1951, et ce jusqu’à la fin de leur fabrication par l’usine Pathé en Décembre 1956.
• De surcroît, la qualité de la pâte des 78 tours pressés à partir de 1951 est à nouveau grandement modifiée : celle-ci est broyée plus finement, mais elle est plus tendre (donc s’use plus vite que les disques des années 1930 et 1940), mais le bruit de fond est moindre. Chimiquement, la pâte n’est plus liée par de la cire d’origine organique naturelle (la gomme-laque), ni par une résine phénolique, mais désormais par un polymère pétrolier qui préfigure l’arrivée à moyen terme du futur disque en vinylite puis en vinyle 33 et 45 tours (mais ceci est une autre histoire).
• Ensuite, la largeur du sillon se retrouve réduite à 75 microns, ce qui permet de pouvoir augmenter sensiblement la durée des enregistrements. Cette possibilité est permise en raison de l’utilisation de burins graveurs plus fins avec des disques Néocire, qu’avec des flancs de cire traditionnels, plus tendres, qui nécessitaient des burins graveurs sensiblement plus larges (entre 80 et 90 microns env.). Le rendu final de ces disques permet une augmentation importante de la réponse en fréquence, notamment dans les aiguës ; une diminution du bruit de fond, au prix toutefois d’une moins bonne réponse en fréquence dans les basses, ceci étant dû au fait que le son, avant d’être gravé sur le disque Néocire de référence, voit les fréquences graves comprimées en amplitude pour éviter les saturations lors des relectures et d’autres désagréments techniques.
• Enfin, concernant les étiquettes des 78 tours pressés (ou repressés) à partir de 1951, l’encre dorée disparaît au profit d’une encre argentée. Ce changement ne procède pas d’une mode ni du hasard, mais au contraire d’une indication pour la clientèle : tout 78 tours imprimé avec une encre argentée ne doit jamais être écouté avec un ancien phonographe manuel (ou électrique) muni d’ une tête lourde, avec une aiguille en fer, mais doit être lu uniquement avec une platine tourne-disque électrique moderne, à tête légère (2 à 4 grammes de pression) munie d’un saphir ou d’un diamant taillé pour les 78 tours (sillon standard env.70 microns), sous peine de détruire le sillon dès la première écoute si l’on procède différemment !
• Nota : c’est pour toutes ces raisons que beaucoup de collectionneurs de disques ne considèrent pas les 78 tours récents (post 1951) créés à partir d’un enregistrement sur bande magnétique transféré via un disque Néocire comme de « vrais 78 tours », et les ont longtemps délaissés au profit des 78 tours antérieurs, qui, il est vrai, possédaient une sonorité bien différente.